Breguet, un horloger qui avait pour clientèle la noblesse.
On n’est pas sans savoir que les talents d’Abraham Louis Breguet se sont fait remarquer par la Cour et la famille royale. La commande de la montre dite Marie Antoinette, par un proche de la Reine du même nom en est l’illustration parfaite. Cependant, de tels clients ne pouvaient pas plaire aux instigateurs de la Terreur.
(La montre Marie Antoinette. Refaite à l’identique grâce aux archives)
C’est pourquoi durant les deux ans de sa sanglante existence (1793-1795) Breguet préféra quitter la capitale pour revenir dans sa Suisse natale.
Ses deux ans d’exilé furent propices à la réflexion. Il en découla dès 1794, l’idée de la montre à souscription. Elle vient proposer au plus grand nombre, la précision et la bonne qualité à un prix abordable et le tout dans un même boîtier. En effet, à cette époque, on distinguait les montres précises qui étaient faites pour l’astronomie et la marine. Et les montres de tous les jours qui étaient bien souvent de mauvaises qualités et dont les prix n’étaient pas à la portée du plus grand nombre. D’autre part, la fin de la royauté et la mise en place du Directoire en 1795, après la Terreur, avaient fait apparaître une nouvelle clientèle. À laquelle il fallait s’adapter.
1796, apparition de la montre de souscription : un moyen pour toucher un plus grand monde et financer les inventions.
Comment fonctionnait la souscription ?
Si ce nouveau modèle s’appelle ainsi, c’est bien parce qu’il a pris le nom de son mode d’acquisition. En effet, lorsqu’on souhaitait obtenir une de ces montres, on devait souscrire à un cahier des charges. Puis payer une partie de la somme. Les montres étaient livrées au fur et à mesure de leur production et dans l’ordre de réception des acomptes. Leurs prix étaient de 600 francs pour celles dotées d’un boîtier en argent et de 800 pour celles avec un boîtier en or.
Comme vous avez pu le remarquer, les montres de souscription sont dotées d’une seule aiguille. Au point de vue mécanique, le mécanisme habituel dut être repensé afin que cette aiguille indique l’heure avec précision. En plus de cela, Breguet voulait que le calibre de ces montres soit conçu avec tous les mobiles accessibles et démontables individuellement, de manière à ce que leur mouvement puisse être entretenu et réparé partout, même par des horlogers peu expérimentés.
La simplicité de ce mécanisme lui permettait de proposer une montre à un prix abordable. Même si 600 francs représentait tout de même plus que le salaire annuel d’un ouvrier. Par conséquent, les clients visés faisaient partie de la classe moyenne. En demandant au client de payer une partie à l’achat et le reste à la livraison, cela permettait à Breguet de se doter d’une certaine trésorerie. Cette dernière lui permettant de financer ses créations et autres commandes exceptionnelles.
Un calibre et plusieurs utilisations.
N’oublions pas que Breguet et les têtes dirigeantes vont de pair. En effet, les inventions de cet horloger génial ont bien souvent servi aux membres de la Cour et autres.
L’apparition de la montre à tact, dérivée du calibre de la montre de souscription, est le parfait exemple. En effet, en 1799, date de son apparition, l’Europe est encore dotée de royautés. Et il va de soi que quand la Cour est réunie, regarder sa montre n’est pas une chose qui se fait. Cela pourrait être pris pour un affront envers le souverain, siégeant à cette réunion. Quand le Roi est là, toute votre attention doit se porter sur lui. Vos petites affaires attendront.
Avec la montre à tact, vous pourrez connaître l’heure en glissant simplement vos doigts dans votre poche et en sentant le relief de l’aiguille ainsi que les 12 repères saillants situés autour de la boîte. D’autre part, votre montre vous servira aussi si, pris par une insomnie vous vous réveillez. En palpant simplement votre montre, vous saurez quelle heure est-il et le temps qu’il reste avant le début de votre journée.
(Le relief de la flèche et la disposition des diamants au niveau des heures permettent de connaître l’heure par le toucher)
Dans un article en date du 6 octobre 1806 écris par un certain H. Raymond dans le journal des arts, des sciences, de littérature et de politique : « On ne saurait parler d’horlogerie sans parler aussi de Breguet. Cet artiste a reculé les limites de l’art au point qu’il n’est plus possible de le surpasser. Il est de voir la quantité de montres qui circulent sous son nom. Cependant, à peine s’en trouve-t-il une sur mille qui soit de lui ».
Cet article élogieux explique l’apparition des signatures secrètes, présentes sur les cadrans Breguet. Elles sont réalisées à l’aide d’un pantographe. Elles sont un moyen pour lutter contre les contrefaçons. La vente de 700 exemplaires de montre de souscription démontre du génie de cette création et de l’importance qu’a Breguet dans le marché horloger.
(Un pantographe et les signatures secrètes)
Deux montres, origine d’une même collection.
Afin de comprendre le design des montres de la collection Tradition, il faut savoir que certaines montres à tact avaient en plus un petit cadran. Expliquant pourquoi les cadrans des montres de la collection Tradition sont excentrés. En plus de cela, la symétrie du design du calibre de la montre de souscription a été reprise.
On se retrouve donc avec 5 déclinaisons de modèles de la collection Tradition qui ont pour sources ces deux modèles qui marquèrent l’horlogerie par leur utilité et leur prouesse techniques.
Tradition
Tradition Chronographe
Tradition GMT
Tradition seconde rétrograde
Tradition tourbillon
En 2005, en lançant cette collection Breguet a su honorer le génie et la mémoire de leur fondateur en dotant le monde de l’horlogerie de modèles qui firent naître de nouveaux brevets et suscitèrent de nouvelles inventions. La reprise d’invention en les remettant aux goûts du jour tel que les ressorts-timbres de 1783 pour la Tradition répétition minutes tourbillon démontre que la technique chez Breguet est encore présente.