Mr Montre propose une rubrique baptisée « Entretien avec » qui permet de faire le point sur les activités d’un acteur du marché de l’horlogerie. Après François Moreau, le CEO et fondateur de RESERVOIR Watch, Nicolas Boutherin, le co-fondateur et directeur artistique de la marque Klokers, Yohan Bizy, le Directeur Général France de Frédérique Constant, Vincent Coquet, le directeur d’Oris France, Etienne Malec, le fondateur et patron de la marque Baltic Watches, Franz Linder, le CEO de la marque Mido, Lilian Thibault, le fondateur et patron de la marque Awake Concept, Federico Restrepo, le fondateur de la marque Restrepo Watches, Maxime Herbelin, le directeur marketing de la marque Herbelin, et c’est au tour de Carlos Rosillo, le co-fondateur de Bell & Ross, c’est au tour d’Arnaud Pézeron, le co-fondateur de SYE [Start Your Engine], d’accepter de répondre à nos questions.
Arnaud Pézeron bonjour, SYE [Start Your Engine] propose depuis fin 2020 des montres avec un système de bracelets interchangeables assez novateur. D’où vous est venue l’idée de créer une marque de montres ?
Bonjour Alexandre et bonjour aux lecteurs de MrMontre. C’est une longue histoire 😉 L’histoire de SYE [Start Your Engine], c’est avant tout une histoire de passion. J’ai commencé à m’intéresser très tôt à l’horlogerie, si je me souviens bien dès ma 1ère montre pour ma communion. Et puis les choses se sont accélérées à la fin des années 1990 où j’ai découvert le modèle qui allait laisser une trace profonde dans ma passion des montres : la Spaceman d’André Le Marquand.
À l’époque je m’intéressais beaucoup au design, je fréquentais les brocantes et les marchés aux puces quand je suis tombé un jour en arrêt sur cette montre étrange, vraiment différente qui a été l’étincelle d’une collection dévorante. Cette montre a aussi été le point de départ de beaucoup de recherches, de documentation sur le design horloger des années 60/70/80 jusqu’à créer un blog, Montresdesign, dans lequel j’ai tenté de mêler nouveaux modèles, montres vintage et projets de jeunes designers.
Certains d’entre eux ont fait germer l’idée de créer un jour une marque de montres. La graine a mis du temps à pousser. Je voulais pouvoir lancer une marque qui apporte un peu de nouveauté en termes de style, une personnalité reconnaissable entre mille et également travailler sur les matières en exploitant leur beauté brute.
Pouvez-vous nous présenter SYE en chiffres ? Nombre de salariés, nombre de montres vendues chaque année, prix moyen d’une montre de la marque…
SYE [Start Your Engine] nous a demandé 3 années de développement produit car il fallait partir d’une feuille entièrement vierge : concevoir la boîte, inventer le système d’intégration et concevoir les bracelets pour tenir notre pari. Nous en sommes actuellement à 2 années entières de commercialisation.
Les retours clients sont excellents, les ventes sont au rendez-vous mais on peut faire beaucoup mieux et on s’y attelle en développant actuellement notre distribution.
Pour animer tout cela, nous sommes une équipe de 3 personnes qui ne chôme pas. Notre panier moyen se situe autour de 700 € TTC avec un souhait de rester sur des tarifs abordables malgré le contexte.
En quoi se différencient les montres SYE des autres modèles de montres qui ont des bracelets intégrés (type PRX) ?
Le design de notre modèle MOT1ON se caractérise par l’intégration très poussée entre un bracelet cuir et la boîte en acier. Le cuir rentre littéralement dans la boîte au contraire de nombreux autres systèmes et c’est cette alliance entre l’acier, froid, et le cuir, chaud, qui donne toute sa dimension au concept.
Notre inspiration a été puisée dans les intégrations ultra-poussées que l’on a pu observer notamment sur des motos custom avec une fusion carrosserie/sellerie assez saisissante. Nous avons voulu reproduire le même sentiment, le même effet waouh au poignet.
L’autre point fort de différenciation tient dans le système d’assemblage, baptisé Fastback™. L’idée était de créer une expérience unique pour changer son bracelet comme on pourrait le faire avec un jeu Meccano. Nos clients adorent ce système unique, solide, pratique, esthétique et vraiment fun.
Quel est le profil type d’un acheteur de montres SYE ?
C’est un homme (très majoritairement), quadra qui aime se faire plaisir avec de beaux objets et qui a une affinité toute particulière pour l’univers auto & moto.
Quels sont les modèles de montres les plus populaires de la marque ?
Nous avons actuellement 2 modèles déclinés en plusieurs versions de cadrans et de bracelets. Le modèle Automatic24 tient la corde d’une très courte tête devant le modèle Chronograph.
Nous avons récemment lancé une série limitée du Chronograph Bullitt qui a cartonné avec son cadran vraiment particulier vert/gris. Nous avons retenté l’expérience avec une nouvelle série limitée Bullitt Titanium qui plait beaucoup.
Vos montres proposent un calibre mécanique (Miyota) ou Meca-quartz (Seiko) pour les chronos. Pourquoi ne pas proposer un calibre suisse ou franco-suisse via des marques comme Lajoux-Perret ?
Excellent point. Initialement nous souhaitions nous doter exclusivement de mouvements mécaniques pour être parfaitement en ligne avec notre ADN. Mais lancer un chrono mécanique signifiait dépasser la limite psychologique imposée au lancement, la barre des 1000 €. Du coup, nous avons exploré d’autres voies et découvert le mouvement Seiko mécanique-quartz qui est réellement bluffant.
Dans le futur notre offre s’enrichira de nouveaux calibres. On vise également à doter nos montres de mouvements, peut-être moins sophistiqués mais qui offrent une fiabilité hors pair et c’est très important pour une jeune marque.
Quid du SAV ? Est-il localisé en France ?
Nous collaborons avec Reparalux, situé à Besançon, pour notre assemblage comme notre SAV. Un atelier à taille humaine, mené de père en fils depuis quatre générations, et réactif qui nous permet de tenir des délais très courts dans les rares cas où nous devons prendre en charge une montre en SAV.
Comment comptez-vous développer la notoriété de la marque en France dans les prochains mois ?
Depuis notre lancement, la visibilité est cruciale pour nous. Nous avons essentiellement développé notre visibilité dans les médias et sur les réseaux sociaux. Mais aussi en face à face.
Pendant la période de pré-commande nous avons mis en place des RDVs individuels pour découvrir la marque et les modèles et depuis nous avons cultivé cette culture de proximité. Notre très bon bouche-à-oreille en découle sûrement. Nous allons poursuivre nos efforts avec nos moyens limités et merci de nous donner la parole, cela compte beaucoup pour nous.
Vous n’avez pas cédé aux joies du financement participatif pour faire découvrir votre marque et pour doper les précommandes. Pour quelle raison ?
Excellente question sur le financement participatif. À l’origine j’ai beaucoup étudié tous les projets horlogers qui sortaient sur Kickstarter en essayant de bien comprendre le modèle. J’ai aussi interrogé quelques créateurs de mon réseau qui y étaient passés et tous m’ont décrit une plateforme très automatisée, rigide, où les créateurs devaient de toute façon mobiliser leur communauté pour réussir leur campagne.
L’autre élément qui m’a détourné de Kickstarter, c’est qu’en se rapprochant de la date du lancement, en 2020, la pléthore de projets qui y apparaissaient n’étaient pas forcément des projets de qualité. Du coup, quitte à lancer SYE en pleine pandémie mondiale, autant créer une expérience de marque totale et créer un lien avec la communauté directement sur notre site web. C’est d’ailleurs l’optique pour laquelle ont opté plusieurs marques qui ont démarré sur les plateformes de financement participatif.
Comptez-vous rester 100 % digital ou comptez-vous également vous développer dans des boutiques physiques ?
Nous souhaitions développer une présence omnicanale dès le démarrage mais le lancement en pleine période de pandémie a forcément eu des répercussions sur notre développement en boutiques physiques. C’est aujourd’hui notre priorité. À la fois pour développer une présence représentative en France avec un bon maillage du territoire mais aussi pour nous développer à l’international.
Le web reste une plateforme importante dans notre souhait de proposer une expérience différenciante, nous travaillons d’ailleurs à proposer de nouveaux outils immersifs sur le site.
En dehors des montres SYE, quelles sont les 3 montres (de votre collection ou non) qui vous font le plus rêver ?
Certainement, la question la plus difficile de l’interview. J’aime l’horlogerie non conventionnelle même si mes goûts se sont assagis avec le temps. Alors, voici mon podium très personnel :
1- La Urwerk UR-103, certainement un de mes plus violents chocs horlogers. Je suis admiratif du tandem Baumgartner-Frei et de leur vision.
2- La MB&F HM5, c’est une remarquable adaptation de l’Amida Digitrend qui est en belle place dans ma collection. Une montre dans le plus pur style des drivers’ watch et qui avec Max Büsser prend une tout autre dimension, notamment avec ses persiennes qui sont à tomber.
3- Mon Omega Speedmaster 176.0014 aka TV, j’aime beaucoup le modèle iconique qu’est la Speedmaster mais j’ai un gros coup de cœur pour ses itérations des années 70 en version Mark 4.5 et TV. Elles ont encore plus de personnalité et j’aime ça.
C’est cruel de ne se contenter que de 3 modèles et de laisser dans l’ombre les LIP Tallon et Baschmakoff, les Ikepod, les Spoons et autres Spaceman.
LAFFORGUE PATRICK
16 juin 2024 at 11 h 04 minPassioné de montres, j’ai rencontré sur le stand de Bordeaux le CEO de SYE.
J’ai craqué sur le design du Chronograph de la marque en Titanium, alors qu’en général, je reste plutôt classique sur le matériau des mes chères (!) garde-temps.
Contact très sympathique, passions communes, désir de transmettre ses compétences et sa réussite, nous avons vite fait cause commune de défendre le côté made in France et la beauté évidente de la finition de sa collection.
Nous verrons dans le temps comment ma dernière née va évoluer, mais je suis déjà persuadé qu’elle va faire parler d’elle autour de moi !
PatrickL.